La chronique de Bernard Kaboré

Vol par effraction: confondu au tribunal par la vidéo d’une caméra cachée

Prévenu de vol par effraction d’appareils électroniques dans la boutique d’un particulier, Hubert, un jeune homme de 23 ans, n’a pu se défaire des liens de la prévention, condamné à 18 mois de prison ferme et une amende d’un million de F CFA avec sursis. Pourtant Il était à deux doigts d’être relaxé au bénéfice du doute n’eût été les pièces à conviction, notamment la vidéo d’une caméra cachée le montrant dans la boutique dévalisée.

Difficile d’imaginer Hubert capable de s’introduire dans une pièce par le toit d’une boutique d’appareils électroniques pour en ressortir les bras  chargés d’objets volés. Tant sa corpulence chétive l’exempte de tout soupçon; sans oublier son jeune âge, 23 ans à peine, qui lui donnent un visage encore plus innocent. Pourtant en décembre 2021, ce marchand tablier a littéralement dévalisé la boutique de Moustapha, un commerçant quadragénaire. Des chargeurs de téléphones portables, des clés USB, et d’autres articles électroniques, le tout d’une valeur d’un peu plus d’un million ont été emportés.

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En s’introduisant dans la boutique, Hubert a alors oublié un gros détail. Ou du moins, il n’a pas eu connaissance d’un système de surveillance vidéo installé dans la boutique. Sinon, il aurait réfléchi par deux fois et aurait renoncé à l’acte que lui dicta sa vicieuse conscience. Mais l’adage en pays moaga dit que lorsque l’âne veut vous renverser, l’alerte qu’il donne par ses oreilles vous échappe. Eh bien, les faits et gestes du jeune homme ont été capturés par la caméra cachée dans une bande vidéo qui a été un précieux indice pour les enquêteurs.

Après la mauvaise  visite  que son commerce a reçue, Moustapha a pris son mal en patience. Puis, le sort joua en sa faveur quand il reçut le suspect numéro un dans sa boutique. En effet, comme un client ordinaire, Hubert y a fait un tour pour une transaction mobile money. Belle fut l’occasion pour le maître des lieux. En effet, tout en opérant la transaction, Moustapha a photographié le client suspecté à son insu. Désormais, il dispose donc de deux pièces qui pourraient mieux situer les services de police judiciaire, lesquels se sont d’ailleurs sans doute basés sur ces pièces pour mettre la main sur le jeune Hubert.

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En enquête préliminaire tout comme devant le procureur, le prévenu s’est reconnu dans le cliché du proprio de la boutique mais pas dans la vidéo secrètement tournée. Et lorsqu’il comparait devant le tribunal de grande instance de Ouaga 1 pour répondre des faits de vol aggravé, la posture d’Hubert a évolué. Il a balayé du revers de la main toutes les pièces à conviction présentées par la victime. Il a même juré n’être jamais  allé dans la boutique de Moustapha. Un instant de doute qui a appelé à la méticulosité des juges et  celle du ministère public. Le président a, en effet, demandé que la vidéo intégrale montrant le suspect dans la boutique lui soit présentée. Chose faite séance tenante. Et lui d’hésiter en posant tour à tour son regard sur la vidéo en question et sur le prévenu à la barre : « Je ne suis pas expert en reconnaissance faciale mais… ». En demandant à l’huissier de présenter une fois de plus les pièces au prévenu, le président a accompagné son ordonnance par cette question à l’endroit du mis en cause : « ne trouvez-vous pas qu’il y a une ressemblance entre les sujets dans la vidéo et la photo ? » « Non, je ne vois pas la ressemblance », a rétorqué le prévenu qui a comparu assis au motif d’un mal de pied qu’il a contracté durant sa détention à la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou. « Il n’y pas de doute, c’est bien lui qui se trouve sur la photo et sur la vidéo », s’est convaincu le parquetier. De quoi faire jaser au sein de l’assistance. En soutenant qu’Hubert est loin d’avoir les mains propres, le ministère public a assis sa conviction avec un autre détail : le prévenu réside dans le même quartier où l’infraction a été commise, fort probable donc que ce lieu ne lui soit pas étranger.

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Dans ses réquisitions, le parquet a souhaité qu’il plaise au tribunal de condamner le jeune Hubert à 36 mois de prison dont 24 ferme et à une amende d’un million de F CFA assorti de sursis. Mais le tribunal a visiblement eu la main moins lourde envers le mis en cause qu’il a reconnu coupable. En effet, Hubert a été condamné à 18 mois fermes, à une amende d’un million assorti de sursis ainsi qu’au paiement de 1 033 000 F CFA à Moustapha à titre de dommages et intérêts. Une condamnation pécuniaire qui pèse le fardeau pour le jeune homme au revenu précaire de marchand tablier. Où trouvera-t-il cette somme ? Pendant combien de temps devra-t-il travailler pour la solder ? Auprès de qui pourrait-il emprunter de l’argent pour se tirer d’affaire ? Autant de questions qui taraudaient sans doute l’esprit d’Hubert au moment de quitter la barre, la mine malgré tout sereine, se disant peut-être : « Je penserai mieux à tout cela au cours des 18 mois de détention; je trouverai bien la solution ». Mais pourvu qu’il ne soit pas tenté de commettre un autre tort pour réparer le premier. Il sait d’ailleurs ce qu’il lui reste à faire désormais pour éviter ses emmerdes actuelles. Eh bien, c’est de suivre ce conseil de l’écrivain Amadou Kourouma : « Quand on ne veut pas être touché par les queues des singes, on s’éloigne de leurs bandes ».

Bernard Kaboré

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