La chronique de Bernard Kaboré

Justice: Un transitaire escroc à la barre

Soul, transitaire, a-t-il usé de faux et abusé de la confiance de ses clients ? En tout cas, il risque gros car les avocats de ces derniers lui réclament plus de 55 millions de F CFA pendant que le procureur a requis contre lui 36 mois de prison dont 24 fermes.

Chemise rose impeccable, une montre bien en évidence au poignet, c’est un Soul décontracté  qui s’est présenté à la barre. Bon teint éclatant, plutôt  élancé, cheveux soigneusement coupés, il aurait fait un bon mannequin s’il n’avait pas opté pour une vie de transitaire. Et c’est parce qu’il aurait mal exercé cette profession que le trentenaire a maille à partir avec la justice.

L’affaire remontre aux mois de mars et avril 2020 et fait suite à des plaintes déposées par trois commerçants pour les mêmes faits : abus de confiance, faux et usage de faux en écriture publique. Les plaignants disent avoir sollicité les services de Soul pour le dédouanement et l’immatriculation de véhicules nouvellement achetés. Les différentes prestations devant être exécutées dans un délai de trois mois maximum selon le marché conclu,  ce fut finalement le désespoir pour messieurs Dipama, Zongo et Somé (des noms d’emprunt). Pourtant, le transitaire a reçu différentes sommes d’argent de la part de ses « chalands » d’un montant  cumulé de 9,5 millions de F CFA. Ce qu’il réussira à faire, c’est de leur remettre en retour des copies de récépissés de cartes grises, lesquelles se révèleront fausses. Puis plus rien, et toujours la même excuse servie par Soul: « ça traine parce qu’Interpol n’a pas apposé sa signature sur certains documents ».

Témoin fabriqué…de toutes pièces

Par la suite, il se met aux abonnés absents lorsque ses « chalands » tentent de le joindre au bout du fil. Jusqu’à ce que Dipama lance un avis de recherche sur les réseaux sociaux, lequel avis a servi à la gendarmerie pour mettre la main sur Soul.

Devant le juge, le prévenu n’a pas reconnu les faits d’abus de confiance mais ne nie pas avoir été impliqué dans du faux. Il cite, à maintes reprises, un certain Toé, un autre transitaire, à qui il dit avoir fait recours pour l’accomplissement des services à lui demandés. « Devant les enquêteurs de la gendarmerie, ce Toé s’appelait Bachir», s’étonne le parquetier. Et de déduire que ce Toé est un personnage fabriqué de toutes pièces par Soul « pour se tirer d’affaire ».

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La partie civile et le ministère public, eux, se sont accordés sur le fait que toutes les infractions sont constituées. L’accusation s’appuie en outre  sur l’argument selon lequel le prévenu n’a rien entrepris pour remédier au faux lorsqu’il s’en est rendu compte. Mieux, « il se cachait  lorsqu’il se sentait coincé».

Si le tribunal venait à déclarer le prévenu coupable, les avocats des plaignants évaluent le préjudice de leurs clients à 55,9 briques. L’accusation demande par ailleurs que le mis en cause paie les frais du dossier à hauteur de 500 000 F. Contre celui qui, avant d’être placé sous mandat de dépôt, exerçait le métier de transitaire depuis quatre ans, le procureur a requis une peine de 36 mois, dont 24 fermes. Il devrait également s’acquitter d’une amende d’un million de F CFA.

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En attendant la décision du juge, ce sont des mines à la fois de regret et d’espoir qu’affichaient les trois plaignants au moment de quitter la salle d’audience. A leurs dépens, ils auront sans doute compris ce que la poétesse française, Constance Marie de Théis, affirmait déjà en 1835 : « Un des plus poignants chagrins que l’on puisse éprouver est de voir que ceux à qui on a donné son entière confiance n’en étaient pas dignes. » 

Bernard Kaboré

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