Tribune

Lutte contre le terrorisme : La réconciliation nationale est une arme à ne pas négliger

 Le 7 janvier dernier, Ablassé Ouédraogo, ancien ministre des Affaires Etrangères et président du parti Le Faso Autrement a lancé un appel légitime aux nouvelles autorités burkinabè pour un retour au pays de l’ancien président Blaise Compaoré. Cet appel du docteur Ablassé Ouédraogo a le mérite de relancer  la question de la réconciliation nationale qui est plus que jamais d’actualité. Qu’en est-il ?

Alors que le MPSR I, et avant lui le régime de Roch Marc Christian Kaboré avait dédié un ministère plein à la problématique de la réconciliation nationale, l’actuel régime en a fait un appendice du ministère de la Solidarité, de l’Action humanitaire, du Genre et de la Famille. Un choix politique qui n’est pas seulement motivé par le besoin de réduire le train de vie de l’Etat mais aussi et surtout par l’absence d’une vision stratégique claire et d’une appréhension tactique opportune de l’importance de la réconciliation nationale dans la lutte contre le terrorisme. Conséquence, les actions initiées sous les présidents Kaboré et Damiba en la matière sont reléguées aux oubliettes ou complètement vendangées. Aujourd’hui, le Burkina se prive donc d’une arme qu’il ne devrait pourtant pas négliger dans la lutte contre le terrorisme.

Ablassé Ouedraogo par son appel au retour de Blaise Compaoré, relance la question de la réconciliation nationale au Burkina

Les experts et autres analystes en matière de sécurité sont unanimes : les membres des groupes armés terroristes (GAT) qui endeuillent quotidiennement le Burkina sont en grande majorité des combattants burkinabè qui ont fait allégeance à l’Etat islamique au grand Sahara (EIGS) et au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM).  Ces jeunes Burkinabè qui ont rejoint ces organisations terroristes l’ont fait, pour la grande majorité d’entre deux davantage  soit pour des besoins pécuniaires et/ou de reconnaissance sociale, soit pour défendre leur communauté ou se protéger dans un contexte où nombre d’entre eux sont victimes de délit de faciès. Les raisons politiques et idéologiques d’ordre religieux ne sont donc pas au premier plan.

C’est connu, le déficit criard en services sociaux de base dans les régions du Sahel, du Nord et de l’Est, les difficultés spécifiques à la vie de nomade de la majorité des populations qui y vivent, le chômage, la quasi-absence de l’Etat et les injustices sociales intracommunautaires locales ont constitué un terreau fertile de la radicalisation de ces Burkinabè, facilement endoctrinés par des marchands d’illusions. L’effondrement de la Libye, la sanctuarisation de l’EIGS et du GSIM dans le nord et le centre du Mali ont grandement favorisé l’expansion de ces GAT au Burkina.

Les autorités du MPSR II sont bien imprégnés de cette situation et avant elles, le gouvernement d’Albert Ouédraogo sous le président Damiba. La plupart des combattants des GAT qui endeuillent nos famille et menacent jusqu’aux fondements de l’Etat étant des Burkinabè, le climat entre les communautés se détériorant depuis 2016, les raisons économiques, sociales et psychologiques de la radicalisation sues, travailler à les réconcilier avec l’Etat, leur communauté d’origine et leurs frères d’autres communautés nationales est d’une grande importance, selon toute évidence. Les prédécesseurs du capitaine Ibrahim Traoré n’avaient donc pas tort de penser que l’une des armes pour vaincre le terrorisme est la réconciliation intercommunautaire, entre les acteurs politiques nationaux et de l’Etat avec les citoyens qui ont divers griefs envers la nation.

Pourquoi le MPSR II, l’administration étant une continuité, n’a pas continué à défricher ce champ de la réconciliation nationale entamé sous le président Roch Kaboré et élevé en priorité nationale par Paul-Henri S. Damiba ? La politique d’exclusion et de stigmatisation est pourtant à l’opposé de la volonté du capitaine Ibrahim Traoré qui veut voir les Burkinabè faire front commun dans un sursaut national contre l’ennemi terroriste. En vérité, reléguer aux oubliettes la réconciliation nationale aux plans intercommunautaire et politique est antinomique de l’appel à l’union nationale auquel tous les Burkinabè patriotes ne peuvent qu’adhérer.

Le président Ibrahim Traoré est donc interpelé. Le MPSR II ne peut pas vouloir d’une chose et son contraire. Le sursaut national va de pair avec la réconciliation nationale et il n’y a aucune honte à semer dans un champ qu’aura défriché ses prédécesseurs. Bref, en un mot comme en mille, dans la lutte contre le terrorisme, la réconciliation nationale au plan intercommunautaire et politique est une arme que l’Etat ne doit pas négliger. A bon entendeur…

Mohamed TRAORE

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