Société

Cinquantenaire de L’Obs. : c’est parti pour deux jours de réflexion sur l’avenir des médias traditionnels africains

« Les médias traditionnels africains face au développement du numérique : résilience, opportunités et défis » : C’est sous ce thème que s’est ouvert ce mardi 23 mai 2023 à Ouagadougou un colloque international organisé par le quotidien privé burkinabè, L’Observateur Paalga, à l’occasion du cinquantième anniversaire de la naissance de ce canard.

La célébration du cinquantenaire du canard est voulue sobre par les organisateurs, dans un contexte de crise sécuritaire que traverse le Burkina. Mais, visiblement, cela n’entache en rien l’intérêt qu’elle a suscité pour le public. La cérémonie d’ouverture du colloque international en a été l’illustration. Patronnée par le ministre de la Communication, Jean Emmanuel Ouédraogo et coparrainée par le vice-président de la Chambre de commerce et d’industrie, Mamady Sanoh et l’ex-présidente du Conseil supérieur de la communication, Béatrice Damiba, cette cérémonie a, en effet, connu la participation de plusieurs dizaines, voire des centaines de personnes, parmi lesquelles un gotha d’enseignants chercheurs, des représentants d’organisations professionnelles de médias, un parterre d’étudiants…

En lieu et place d’une célébration festive, le comité d’organisation du cinquantenaire a voulu plutôt que ce jubilé d’or soit placé « sous le signe de la réflexion, l’introspection et la prospection ». D’où la tenue du colloque, selon le président du Comité d’organisation, Ousseni Ilboudo, par ailleurs directeur de la Rédaction de L’Observateur Paalga.

Pendant deux jours, une quinzaine de communications seront livrées par d’éminents chercheurs et professionnels des médias autour de la thématique générale : « Les médias traditionnels africains face au développement du numérique : résilience, opportunités et défis ». Une thématique plus que jamais d’actualité, selon plus d’un. En effet, l’environnement médiatique a connu un bouleversement avec l’avènement du numérique, notamment de l’Internet et des réseaux sociaux qui « deviennent une autre source d’information, surtout de désinformation et parfois de diversion », pour paraphraser le Pr Magloire Somé, président du comité scientifique du présent colloque.  

En introduction aux différentes communications qui meubleront le thème général, le Pr Somé a fait noter que depuis deux décennies environ, l’Internet a offert des possibilités quasi illimitées de production de l’information allant de l’information juste parce que exacte à la désinformation et à l’intoxication. « Le numérique apporte un plus avec des atouts immenses, mais aussi tous les risques de dérives. Les médias traditionnels se retrouvent dans l’obligation de s’adapter au nouveau contexte très mouvant du reste en raison de l’évolution rapide des technologies de la communication », dit-il. Et d’ajouter : « L’hyper interactivité que jouent les réseaux sociaux compte beaucoup pour la mobilisation citoyenne, mais aussi sur la fabrique d’une opinion volatile et vulnérable parce que mal avertie et n’ayant pas de capacité de discernement. Or, comme le fait remarquer Jacques Attali, «< l’information est une arme et constitue même le code de la vie »> au contraire de la rumeur qui agit comme un virus détruisant les défenses immunitaires de sa victime. De ce point de vue, les médias traditionnels, en particulier la presse écrite, ont un devoir de résilience pour continuer d’utiliser l’arme de l’information juste, moyen de lutte contre la désinformation, les fausses informations et l’intoxication rampantes ». Pour le président du comité scientifique du colloque, « la presse, en particulier, est obligée de s’adapter ou de disparaître », regrettant, au passage, la disparition de pas mal de journaux dont l’hebdomadaire satirique, JJ.

Le colloque est également  l’occasion de revisiter l’histoire de la presse privée au Burkina, voire en Afrique francophone. Une histoire peu dissociable de celle de L’Observateur Paalga, ce  canard qui a poussé son premier cri le 28 mai 1973 pour devenir ainsi le premier quotidien privé imprimé et illustré par la photo. Son directeur de publication, Edouard Ouédraogo explique que bien avant L’Obs., il y a eu de petites tentatives de publications comme Le Kibaré de Boniface Kaboré et le Soleil de Haute Volta.  Mais la modernité de l’Observateur, dit-il, est d’avoir été « le premier quotidien privé, indépendant, imprimé et illustré par la photo ». Mais pas que, sur le plan institutionnel, « c’était la première entreprise de presse, le journal étant assis sur une société à responsabilité limitée qui était chargé de son édition ». « Le Doyen », c’est ainsi que le DP de L’observateur est affectueusement surnommée, se souvient par ailleurs qu’au lancement du journal en 1973, « l’aventure était risquée », aussi bien pour les porteurs du projet que pour les observateurs qui pariaient sur une fermeture après trois mois d’existence.

L’Observateur a relevé des défis, le journal aura traversé également de nombreuses intempéries. Edouard Ouédraogo se rappelle notamment la date du 10 juin 1984 quand, en pleine Révolution, l’imprimerie du canard a été incendiée, condamnant le personnel à sept années de traversée du désert, soit jusqu’en février 1991, date à laquelle le journal a repris sa parution.

En cinquante ans, L’Obs. aura également été d’une importante contribution à la liberté de la presse et à la démocratie. Représentant son collègue de la Communiactaion à l’ouverture du colloque, le ministre de la Jeunesse et des sports, Boubacar Sawadogo a salué « l’audace, le génie, la perspicacité et l’engagement » du journal, qui durant ce demi siècle, a  »éduqué, distrait et sensibilisé ».

Bernard Kaboré

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