Société

JT the Bigga Figga : l’Afro-américain qui prône le retour aux sources

Ils sont nombreux ces jeunes d’Afrique à rêver d’une autre vie aux Etats-Unis. Cette manière de voir les choses, JT the Bigga Figga, de son vrai nom, Joseph Thomson, ne la partage pas, lui qui a quitté San Francisco pour le continent Noir et s’est installé au Burkina Faso en octobre 2019. Cet Afro-américain vit au pays des Hommes intègres avec les siens. Il y monte des projets pour aider les populations délaissées et favoriser le retour des Noirs américains sur leur continent d’origine.

Après son arrivée, la famille Thomon a rendu visite au ministre de l’Intégration africaine et des burkinabè de l’extérieur, Paul Robert Tiendrébeogo

Comment vous est venue l’idée de découvrir votre pays d’accueil ?

Je suis arrivé au Burkina Faso grâce à un programme de la fondation BO (Boukary Ouédraogo). La structure m’a invité à apporter ma connaissance et mon savoir-faire. Je n’avais jamais entendu parler du Burkina Faso auparavant. Mon intention à présent, c’est de représenter ce pays et  lui donner de la valeur aux yeux des autres pays du monde.

Etes-vous citoyen burkinabè à présent ?

Nous avons introduit la demande pour l’obtention de la nationalité burkinabè, ma famille et moi. Je ne l’ai pas encore obtenu contrairement à ce que vos confrères ont relayé dans la presse. Je suis à la recherche de mes origines mais j’ai décidé que mon ADN vient du Burkina Faso.

L’intégration se poursuit-il bien au pays des Hommes intègres ?

Au Burkina Faso, notre intégration s’est faite sans problème. Quand on sortait pour faire des achats j’avais l’impression que les endroits étaient mieux les uns que les autres. Ma femme maîtrise  maintenant le circuit pour les expéditions de colis, les différents marchés. L’établissement de mes enfants dispense des cours en français et  en anglais. Pour la suite, s’il n’y a pas d’université anglaise ici, ils iront au Ghana ou partout ailleurs en Afrique.

De nombreux jeunes du continent rêvent de se rendre aux Etats-Unis. Vous par contre c’est le retour vers l’Afrique que vous prônez. Qu’est-ce qui vous a motivé à cela ?

Les Etats-Unis c’est magnifique. Il faut le reconnaître. Mais là-bas, tu peux te faire tuer facilement et très rapidement. Au Burkina la menace terroriste existe, mais les groupes armées mettent du temps avant de commettre leur forfait. Au pays de l’Oncle Sam, le décompte des meurtres et des assassinats se fait tous les jours. On y trouve des gens moins nantis qui détestent et vont attaquer d’autres citoyens qui vivent dans des quartiers huppés comme Ouaga 2000,  à  l’autre bout de la ville.

Les Noirs sont-ils les plus exposés aux Etats-Unis ?

Si vous êtes noir, le risque de vous faire tuer est encore plus élevé. Les Noirs n’ont pas de traitement de faveur aux USA. Facilement à cause d’un bien comme une montre, une chaussure on peut se faire  abattre. J’ai même été victime d’une agression au cours de laquelle j’ai reçu des balles au niveau du ventre parce que je ne me suis pas laissé faire.

Le retour des Noirs en Afrique peut-il contribuer à réduire la criminalité  et le racisme en Amérique ?

La migration des Noirs américains va contribuer à la baisse  du taux de criminalité. Quand nous y étions,  il fallait se déplacer avec une arme partout. Tu te fais attaquer n’importe où, quel que soit l’heure. En famille, dans le bus. Tout le monde est méfiant.  Tout cela a été suscité par les Blancs qui n’ont pas de considération pour les Noirs.  Si on commence à se diriger vers nos racines c’est l’idéal. Des destinations comme l’Afrique sont très paisible.

Vous évoluez dans le milieu du showbiz. Que faites-vous concrètement ?

J’ai travaillé  avec des stars américaines comme Snoop Dog, 2pac,  The Game, Dj King Assassin, Young Buck, Master, etc. sur l’enregistrement musical et le filmage. J’aime filmer mon vécu pour partager mon expérience.  Mon ambition était de faire briller les personnes dans l’ombre. A force d’être avide d’argent on oublie notre passé. J’essaie toujours de ne pas oublier mes valeurs.  J’ai été obligé par la suite de travailler seul parce que les intérêts  peuvent être divergents quand on collabore à plusieurs.

Ce travail se poursuit-il  sur votre nouvelle terre d’accueil ?

Je suis toujours en collaboration avec des artistes avec qui j’ai  travaillé aux USA. Ici, j’ai pu rencontrer des artistes comme Amzy, Floby, Zoug’nazangmda, Smarty Fleur, Big Sadou, Wend-panga. Les sons déjà enregistrés sont African Show. Pour rendre hommage à la population du Burkina Faso, à Thomas Sankara  notamment, j’ai fait le son Burkina-Burkina. Dans ce tube je chante et magnifie la vision de Thomas Sankara, j’encourage les FDS qui protègent nos frontières, les agriculteurs, etc.  

Existe-t-il une industrie musicale au Burkina Faso ?

Il n’y a pas d’industrie dans le domaine musical au pays des Hommes intègres comme au  Ghana, au Nigeria, en Côte d’Ivoire, mais il y a par contre un énorme potentiel  qui attend d’être libéré… Les artistes burkinabè ont besoin de soutien. Je suis là pour les accompagner mais il ne faut pas oublier qu’il faut une auto-détermination. Personne ne viendra d’ailleurs pour nous grandir  tant qu’il n’y pas cette volonté de prospérer dans ce domaine. Il faut que les gens travaillent tous ensemble ici.  Si j’enregistre un son, un autre artiste peut faciliter la promotion. C’est grâce à cela que l’on va se faire découvrir à l’extérieur.

Le nécessaire est-il réunit, notamment les managers, les studios, les producteurs, la consommation. 

Sur place il y a des professionnels du domaine, le niveau y est. Pour appâter les mélomanes et attirer l’attention sur le Burkina Faso, je communique sur ma chaine youtube, sur www.trapflixtv.com en publiant ce que j’ai produis ici. Les gens s’intéressent à ce que je raconte sur le pays de Thomas Sankara. J’ai composé un son en mooré et en anglais. Même s’il ne comprenne pas  j’essaie de les captiver un peu afin qu’il sache de quoi je parle dans la chanson.  C’est ce qui est important. La consommation aussi n’est pas mal.

Les chansons en anglais sont-elles plus  vendables ?

Il y a ce souci linguistique dans les pays francophones. Un artiste qui utilise le mooré va être limité. J’ai alors travaillé avec un artiste qui se nomme Wend-Panga qui  s’exprime en  français, en anglais et aussi en mooré. Avec cette pluralité de langues, on arrive à étendre notre audience.

Quels sont les projets que vous comptez mettre en œuvre au Burkina Faso ?

Je m’intéressais à des domaines comme la musique mais actuellement je suis en train d’investir dans l’immobilier qui est un secteur d’avenir. Je veux offrir une place non seulement aux Américains qui veulent venir au Burkina Faso, mais aussi à tous ces Burkinabè qui ont besoin de logement.   C’est dans ce cadre que nous sommes allés à Koubri où nous avons obtenu 7 hectares.  Nous espérons en posséder 10 à terme. L’ambition c’est d’héberger 50 familles américaines et 50 autres du Burkina Faso.

Obtenir un logement d’où  vous venez est-ce difficile ?

Acquérir une maison est devenu difficile. On s’assure que vous ayez assez d’argent. Ici par contre, on peut faire un contrat de bail avec une caution avant d’occuper une maison. En Amérique, on vous donne la maison et si vous faite juste un mois sans payer le bailleur vous éjecte. Pire, chez les plus nantis si tu fais deux mois sans payer, on confisque ta maison. J’aimerais aussi m’installer au Ghana pour faire des allers-retours, même si c’est difficile là-bas d’entrer en possession de la terre.  

    W . Harold Alex  Kaboré

Alex.kabore@lobspaalga.com

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