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Création de la monnaie unique CEDEAO : Non aux ‘’études spéculations’’, oui à une ‘’mise en œuvre graduelle’’!

Le premier séminaire parlementaire 2023 de la CEDEAO a clos ses travaux ce 26 janvier à Bissau. Pendant 3 jours, environs 100 participants ont discuté de la création de la monnaie commune et du système de paiement interbancaire dans la Communauté comme promoteurs du commerce régional. La conclusion générale qui se dégage des travaux de ce séminaire c’est l’invite aux experts en monnaie et aux décideurs politiques de la CEDEAO à abandonner les sentiers battus des ‘’études spéculatives’’, des ‘’lenteurs bureaucratiques’’ au profit d’une  »action graduelle » pour la création de la monnaie commune d’ici à 2027.

C’est une cérémonie sobre, marquée par la seule allocution de la 4e vice-présidente du parlement communautaire, Adja Satu Camara Pinto, qui a clôturé les 72 heures de travaux de ce séminaire. Une clôture sobre qui a contrasté avec la richesse des discussions sur le thème de la monnaie unique et du système de paiement interbancaire dans l’espace CEDEAO.

Mme Adja Satu Camara Pinto, 4e vice- présidente du Parlement de la CEDEAO

Pas moins de 9 communications d’une haute teneur scientifique ont aidé les experts et les parlementaires à renforcer leur compréhension et leurs informations sur le processus de création de la monnaie unique pour les 15 pays membres de la CEDEAO. Présentées par d’éminents professeurs d’universités et des directeurs d’agences monétaires ou experts en relations commerciales internationales, ces communications ont porté sur ‘’les problématiques conceptuelles de l’intégration économique’’ ; ‘’ la coopération monétaire dans la CEDEAO vers la monnaie unique’’ ; ‘’ le système régional de paiement et de règlement’’ ; ‘’ le système panafricain de paiement et de règlement dans la ZLCAF, zone de libre échanges continentales africaines ; ‘’le rôle du Parlement de la CEDEAO dans la mise en œuvre du système de paiement et de règlement de la CEDEAO’’, etc.

Professeur Mohamed Ben Omar Ndiaye de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, pendant sa communication

Ce large tour d’horizon des questions d’intégration économique, de paiements interbancaires, de relations commerciales régionales et africaines a convergé à faire comprendre aux participants au séminaire de Bissau le contexte, l’évolution, les obstacles, les acquis et les perspectives de création de la monnaie commune des pays membres de la CEDEAO.

Le contexte qui a vu germer l’idée d’une monnaie commune régionale il  y a près de 40 ans, en mai 1983, est celui de jeunes Etats indépendants qui veulent faciliter les échanges commerciaux entre eux afin de promouvoir leur intégration économique dans une libre circulation des personnes et des biens.

Mais cette idée généreuse va connaître une évolution avec des périodes de flux et de reflux dans sa concrétisation avec plusieurs reports d’échéances pour la création de l’Eco, la monnaie commune de la CEDEAO en 2000, 2003, 2005, 2009 et 2020. La nouvelle échéance de 2027 sera-t-elle la bonne ? Bien de parlementaires de la Communauté veulent y croire et ont exprimé un sentiment de lassitude contre ce que certains d’entre eux ont stigmatisés en ‘’ études spéculatives des experts’’ et au ‘’manque de volonté politique des Etats’’.

Pourtant, les acquis de la CEDEAO qui devraient contribuer à la création de la monnaie unique sont importants : dynamisme des institutions communautaires, libéralisation des échanges commerciaux, marché commun, mécanisme de surveillance de la politique monétaire des Etats membres…

Hélas, l’organisation régionale peine depuis 40 ans à franchir le dernier palier, la mise en œuvre de l’union monétaire, synonyme de monnaie unique, à cause des obstacles suivants : le passé colonial des Etats membres, la multiplicité des monnaies dans la zone CEDEAO, les chocs économiques récurrents internes aux Etats membres, les chocs économiques exogènes à la région, les difficultés politiques et de bonne gouvernance au plan national.

Les perspectives, selon les communications de certains des experts invités à ce séminaire c’est de renforcer la volonté politique des Etats de la CEDEAO afin qu’ils tendent vers le respect des critères de convergence économique nécessaires à la création de l’Eco d’ici 2027. En cela, le Parlement communautaire a un important rôle à jouer.

Le Docteur Alhassan Iddrisu, directeur de la recherche et de stratégie économique au ministère des Finances du Ghana, un des experts invités au séminaire

En rappel, les critères de convergence macroéconomique que se sont  donnés les pays de la CEDEAO pour parvenir à l’union monétaire et à la monnaie unique sont : inflation à un chiffre ; déficit budgétaire inférieur à 3% du PIB ; financement par la banque centrale d’un déficit budgétaire de moins de 10% des recettes fiscales de l’année précédente ; 3 mois de couverture des importations par les réserves brutes extérieures. A ces 4 critères dits primaires, il faut ajouter 2 critères de convergences dits secondaires : un ratio dette /PIB inférieur à 70% et un maintien de la stabilité du taux de change nominal à environ 10%.

Pour les participants au séminaire, il est utopique de vouloir que tous les Etats membres de la CEDEAO remplissent au même moment ces critères de convergence macroéconomique avant de créer l’Eco. Ils ont alors proposé que les Etats membres qui sont proches de ces critères de convergences créent l’Eco dès 2027 et soient rejoints tôt ou tard par les autres pays.

La plénière de la session extraordinaire du Parlement qui s’ouvre lundi 30 janvier va-t-elle adopter des recommandations dans ce sens ? On attend de voir.

Zéphirin KPODA

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