Justice

Sanction de fautes de gestion au Lycée Provincial de Kongoussi : Un point de vigilance sur les pratiques administratives

Le 30 janvier 2025, la Cour des Comptes du Burkina Faso a rendu un arrêt marquant pour la gestion des fonds publics, au Lycée Provincial de Kongoussi, suite à un contrôle des exercices financiers de 2014 et 2015. Cette décision a été rendue suite à l’analyse et la transmission par l’ASC-LC le 16 mars 2021, d’un rapport de l’Inspection technique des services du Ministère de l’éducation nationale et de l’alphabétisation, confirmant ainsi le rôle central de l’Autorité dans la détection et la prévention des irrégularités. Elle met en lumière des irrégularités graves qui ont affecté la bonne gestion des recettes et dépenses de l’établissement, constituant des fautes de gestion.

Trois figures clés du lycée ont été mises en cause. Il s’agit de :

M. S R, ancien proviseur du lycée, poursuivi pour avoir agi en tant que comptable public sans en avoir la qualité : il a collecté des recettes de manière non conforme, notamment en utilisant des carnets de reçus inappropriés et en ne reversant pas les fonds collectés au Trésor public. Le préjudice subi par l’établissement est estimé à plus de 2 millions de francs CFA ;
M. I B B, ex-intendant, poursuivi pour la non-production d’un carnet de reçus, ce dernier a contesté l’existence d’un préjudice direct au lycée. Il a également justifié son comportement par des circonstances personnelles et des erreurs de gestion ;
M. O J, conseiller principal d’éducation, poursuivi pour avoir encaissé des frais de scolarité à titre personnel, sans passer par la procédure légale de collecte. Le préjudice allégué s’élevait à environ 249 200 francs CFA.

Après délibération, la Cour a décidé de :

Relaxer M. I B B et M. O J des principales poursuites,
Reconnaître M. S R a été coupable des manquements aux règles de gestion, notamment l’immixtion dans le recouvrement des recettes, Condamner M. S R d’une amende de 50 000 francs CFA, conformément aux dispositions légales applicables en la matière.

Cette sanction diligemment prononcée par la Cour des comptes illustre la détermination de l’ASCE-LC à impulser une culture de responsabilité et de transparence dans la gestion des fonds publics. Elle rappelle que même en situation de crise, le respect des règles de comptabilité publique demeure une exigence incontournable.

En rappel selon l’article 104 de la loi organique N° 073-2015/CNT du 06 novembre 2015, relative aux lois de finances : Les fautes de gestion sanctionnées par la Cour des comptes sont constituées par :

La violation des règles relatives à l’exécution des recettes et des dépenses de l’Etat et des autres organismes publics ;
La violation des règles relatives à la gestion des biens appartenant à l’Etat et aux autres organismes publics ;
L’approbation donnée à une décision violant les règles visées aux 1er et 2e tirets du présent article par une autorité chargée de la tutelle ou du contrôle lesdits organismes ;
Le fait, pour toute personne dans l’exercice de ses fonctions, d’octroyer ou de tenter d’octroyer à elle-même ou à autrui un avantage injustifié, pécuniaire ou en nature ;
Le fait d’avoir entraîné la condamnation d’une personne morale de droit public ou d’une personne de droit privé chargée de la gestion d’un service public, en raison de l’inexécution totale ou partielle de l’exécution tardive d’une décision de justice ;
Le fait d’avoir dans l’exercice de ses fonctions ou attributions, en méconnaissance de ses obligations, procuré ou tenté de procurer à autrui ou à soi-même, directement ou indirectement, un avantage injustifié, pécuniaire ou en nature, entraînant un préjudice pour l’Etat, ou tout autre organisme public ;
Le fait d’avoir produit, à l’appui ou à l’occasion des liquidations des dépenses, des fausses certifications ;
Le fait d’avoir omis sciemment de souscrire les déclarations qu’ils sont tenus de fournir aux administrations fiscales conformément à la législation et à la réglementation en vigueur ou d’avoir fourni sciemment des déclarations inexactes ou incomplètes ;
Tout autre acte portant préjudice à l’Etat ou aux autres organismes Publics ».

Selon le manuel de vérification à l’usage des juridictions financières des Etats membres de l’UEMOA : « la faute de gestion est un manquement ou une violation des règles ou de principes de bonne gestion des crédits, fonds et valeurs de l’Etat ou de tous autres organismes publics soumis aux règles de la comptabilité publique, par les dirigeants, les fonctionnaires ou agents de l’organisme ». Elle est différente des infractions de corruption et infractions assimilées, mêmes si dans certains cas les deux notions peuvent se confondre.

L’article 80 de la loi organique 14-2000 AN du 16 mai 2000 portant composition, attributions, organisation, fonctionnement de la Cour des comptes et procédure applicable devant elle traite de la même matière. Selon cette disposition, les fautes de gestion sont passibles d’une amende dont le maximum peut atteindre le double du montant du traitement ou salaire brut annuel à la date de l’irrégularité ou de l’infraction sans pouvoir être inférieur à 20.000 francs.

L’affaire du Lycée Provincial de Kongoussi est un exemple frappant des défis que rencontrent de nombreuses institutions publiques en matière de gestion financière. Elle démontre que les contrôles initiés par l’ASCE-LC ne se limitent pas à constater des irrégularités, mais contribuent directement à la consolidation de la bonne gouvernance et à la restauration de la confiance des citoyens dans leurs institutions.

L’ASCE-LC salue cette décision de la Cour des comptes qui constitue une avancée significative dans la lutte contre les fautes de gestion. Chaque sanction devient ainsi un signal fort adressé aux gestionnaires publics : la transparence et la discipline financière sont désormais des exigences incontournables.

DCP / ASCE-LC

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