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IVème République au Burkina : Longévité remarquée n’exclut pas reformes pertinentes

L’agenda politique du Burkina a pris des couleurs en cette fin d’année 2020. Après les élections législatives et la présidentielle du 22 novembre, le pays vogue tranquillement vers la prestation de serment du 2e président démocratiquement réélu de la IVème République et l’installation du Parlement pour une 8e législature, le 28 décembre prochain.

En bientôt 30 ans de vie, la Constitution de la IVème République bat un record de longévité malgré les 6 modifications qu’elle a connues, notamment celle de 2002 qui fit passer la durée du mandat présidentiel de 7 à 5 ans renouvelables une fois. La mouture d’une nouvelle loi fondamentale est dans les tiroirs depuis novembre 2016 et il est possible que les urgences sécuritaire et sanitaire qui assaillent le pays ont remis son adoption aux calendes grecques.

Peut-être bien alors que  la IVème République, après 7 législatures et 2 présidents démocratiquement élus, qui se sont succédé, 3 fois pour Blaise Compaoré et 1 fois pour Roch Marc Christian Kaboré, va continuer  de battre le record de longévité, comparée aux 3 précédentes.

Mais cet arbre d’une relative stabilité institutionnelle ne doit pas cacher la forêt des remous sociopolitiques toujours porteurs de grosses incertitudes pour le pays. En un mot comme en mille,  les institutions du Burkina ne sont pas suffisamment fortes pour garder le Faso à l’abri des aventures ruineuses de leur stabilité. On en voudrait pour preuve, l’insurrection populaire de 2014, la tentative de putsch de 2015 et surtout les récurrentes attaques terroristes depuis 2016 qui remettent en cause jusqu’à l’intégrité du territoire nationale. Il y a donc encore du chemin à faire pour le Burkina dans la construction d’une nation unie et indivisible, véritablement démocratique et stable sur le socle d’institutions fortes.

Dans cette perspective, que nous réserve Roch Marc Christian Kaboré durant son second mandat ? Aura-t-il les mains libres et le courage politique pour réaliser l’une de ses promesses électorales phares ? Celle portant sur la réconciliation nationale et le retour des exilés politiques. Aura-t-il les moyens et la bonne politique pour endiguer le péril terroriste ? Comment va-t-il gérer la fronde syndicale récurrente au Burkina ? Le succès de son second mandat dépendra des bonnes réponses à ces questions.

Autant dire qu’il doit aller tout de suite au charbon après son investiture tout comme son parti le MPP et ses alliés doivent redescendre illico presto des nuages de leur victoire aux dernières élections. Leur champion a été élu par moins de 2 millions de Burkinabè avec un taux de participation  de moins de 50, 25 %. Et être élu par moins de 1 646 000 votants sur environ 6 millions d’inscrits pour une population de plus de 20 millions d’habitants, il n’y a pas de quoi pavoiser. Au contraire, le taux record  d’abstention de 49,78%  des électeurs à cette présidentielle doit conduire à réfléchir sur le système politique burkinabè.

Pourquoi malgré la diversité de l’offre politique, 13 candidats à la présidentielle et 126 partis en compétition pour les législatives, les Burkinabè ne se sont pas bousculés aux urnes ? Peut-être bien que l’offre politique n’était pas à la hauteur des attentes des électeurs mais au-delà du droit, le vote ne devrait-il pas être un devoir pour les citoyens ? Par ailleurs, ne faut-il pas reformer la Constitution pour exiger que le président du Faso soit élu, non pas seulement avec plus de 50% des suffrages exprimés mais aussi avec au moins 50% des inscrits sur les listes électorales ?

Voilà des pistes de réflexion à approfondir afin que la pertinence des institutions républicaines aille de pair avec la légitimité des élus appelés à les incarner. De là à dire que la longévité remarquée de la IVème République n’exclut pas des reformes à même de renforcer la démocratie participative, il y a un pas.

La rédaction

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