Justice

Assassinat Dabo Boukary : Gilbert Diendéré s’en lave les mains

Accusé de complicité d’arrestation illégale, de séquestration aggravée, de coups et blessures volontaires et recel de cadavre dans le dossier Dabo Boukary, le général Gilbert Diendéré a comparu devant la chambre criminelle de la Cour d’appel de Ouagadougou ce lundi 19 septembre 2022. « Golf », comme on le surnomme, a plaidé non coupable, assurant n’avoir ni ordonné l’arrestation d’étudiants ni leur séquestration au Conseil de l’entente et déclarant avoir reçu des ordres pour l’inhumation de l’étudiant en 7e année de médecine à Pô après sa mort au Conseil.

A peine oublié le verdict du procès sur l’assassinat de Thomas Sankara qui a condamné Gilbert Dienderé à la perpétuité, le voilà à nouveau comparaissant devant des juges pour une autre affaire criminelle. Il est supposé avoir joué un rôle dans l’arrestation et la séquestration d’étudiants lors des évènements de mai 1990, évènements au cours desquels l’étudiant en 7e année de médecine, Dabo Boukary a trouvé la mort au Conseil de l’entente. Et pas que, Dienderé est aussi présenté comme complice des infractions de complicité de coups et blessures volontaires et recel de cadavre.

Dans sa déposition à la barre de la chambre criminelle de la Cour d’appel de Ouagadougou, celui qui, au moment des faits était à la tête du Centre national d’entrainement commando et de fait numéro un des militaires du Conseil, n’a pas reconnu les griefs à lui reprochés. Mais avant de dérouler son agenda des 16 et 19 mai 1990, correspondant à l’époque de commission des infractions, l’ex-chef de corps du CNEC s’est incliné devant la mémoire de Dabo Boukary et exprimé sa « compassion à ceux qui ont subi un préjudice » relativement à ce drame. Le 16 mai, Diendéré, selon sa narration des faits, n’était pas au Conseil de l’Entente toute la matinée. Lorsqu’il s’y rend aux environs de 14 heures, il y trouve des étudiants arrêtés. « J’ai demandé qui a ordonné ces arrestations et on m’a dit que les ordres venaient du cabinet du président », dont le directeur est feu Salifou Diallo. Après avoir reçu du cabinet présidentiel l’ordre de libérer les mis aux arrêts, le général Diendéré dit avoir diligenté la mise à disposition d’un car pour ramener les étudiants à l’université qui se situe à un jet de pierre du Conseil.

Trois jours après, le 19 mai, des étudiants sont à nouveau arrêtés et emmenés au Conseil. De retour d’une cérémonie en fin d’après-midi, Gilbert Diendéré dit n’avoir été mis au courant de ces arrestations que tard dans la nuit. « Vers 23 heures, le sous-officier de permanence du Conseil est venu à mon domicile m’informer qu’il y avait un problème, qu’un civil est décédé au Conseil », a relaté le général. Lorsqu’il s’y déporte peu après, Golf constate effectivement la présence du corps de Dabo Boukary. « Je suis allé réveiller le président Blaise Compaoré. Renseignements pris, il apprend que c’est Gaspard Somé qui a ordonné les arrestations. Le président s’est un peu emporté, m’a demandé qui a ordonné cela. J’ai dit que c’était Gaspard. Il est resté sans voix, pendant dix minutes, voire plus avant de me dire de prendre des dispositions pour l’enterrement en ajoutant qu’il allait charger Salifou Diallo d’informer la famille », s’est souvenu celui pour qui cette rencontre avec le chef de l’Etat fut « une douche froide ».

De retour à la permanence, Gilbert Diendéré trouve Gaspard qui assure être entré en contact avec le dircab du président, Salifou Diallo, pour l’inhumation de l’étudiant décédé à Pô où des étudiants ont étés convoyés à bord d’un véhicule au même moment que le transport du corps. « Sur instruction de Salifou Diallo j’ai fait garder les étudiants à Pô. Trois jours après je l’ai appelé à propos et il m’a dit de toujours les garder là-bas ». Finalement, les étudiants retenus à Pô sont ramenés à Ouagadougou à l’approche de la rentrée après que le général a saisi le président au sujet de leur sort, selon  Gilbert Diendéré. « Je les ai fait venir au conseil et je leur ai donné des conseils. Parce qu’ils ont été maintenus dans ce cadre militaire et qu’ils devaient se garder de divulguer des secrets militaires », se souvient l’ex-patron du CNEC. Puis, quelques jours après la libération de ce groupe d’étudiants, « quelques-uns sont revenus me voir pour manifester leur  volonté d’intégrer l’armée. J’ai informé le Président du Paso qui n’y a pas trouvé d’inconvénient en marquant son accord pour l’intégration de ces étudiants », a relaté le général, comme pour clore le bec à ceux qui soutiennent que des étudiants ont été contraints à une carrière militaire.

Bernard Kaboré

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